La campagne décolle enfin...

Ce matin, en arrivant près de la plage de la Concurrence (c'est le nom de la plage du centre-ville de La Rochelle), j'observais le curieux manège d'un retraité BCBG qui aspergeait à l'aide d'une bouteille le panneau municipal dédié à l'affichage libre. Ces panneaux où d'habitude on voit fleurir des concerts, des lotos, le passage d'un cirque ou la photo d'un chat égaré, sont squattés depuis des mois par les candidats à la mairie. Plusieurs fois par jour les trombines changent dans une gabegie écœurante de papier, de colle et de temps perdu.

La candidate dont notre homme était en train de tremper consciencieusement le visage s'appelle justement Jaumouillé et défend les couleurs du PS. Après ce curieux rituel, il s'en retourna vers son vélo, un Peugeot des années 70, pour y fixer sa bouteille, au moyen d'un tendeur, sur le porte bagage. Puis il revint vers l'affiche avec un petit objet dans la main : un râteau miniature pour pot de fleur. Il s'apprêtait à griffer l'affiche quand il se rendit compte qu'il était observé, ce qui eut pour effet d'arrêter son geste. Comme gêné, il faut dire que je trouvais la scène si ridicule que j'affichais un sourire goguenard, il se replia vers le vélo et resta là à attendre que je parte.

Je poursuivais mon chemin en méditant sur la vanité humaine. La bataille des colleurs d'affiches, des arracheurs d'affiches, des tagueurs d'affiches m'a toujours semblé être le degré "0" de la politique. Pourquoi des candidats qui font tous profession d'écologie et de démocratie, gaspillent tant de papier et d'énergie pour recouvrir de leur image celle de leurs concurrents ? Le pire étant à mes yeux ceux qui s'acharnent à déchirer ou à souiller des visages. On ajoute une moustache hitlérienne, un sigle "SS", quelques injures haineuses. On s'en prend aux yeux, aux dents, on ajoute parfois un petit dessin obscène : il est vrai que depuis la fin de la guerre, on n'a pas eu beaucoup de femmes à tondre.

Il paraît que c'est une façon de motiver les troupes, on s'appelle, on sort la nuit, on évite les autres, on passe derrière... Puis, on se fait beau, on trône au-dessus de l'urne, on compte les bulletins, on s'éloigne avec son portable en murmurant des chiffres... Enfin, il y a les gagnants qui exultent qui klaxonnent et les perdants qui ne s'attardent pas tout penauds. Et le lendemain, tout le monde est cocu !

Comments

[tiane]

Voilà: je lis le titre " la campagne décolle enfin...". je me dis (avec un large sourire) "Laurent va nous parler du printemps , des fleurs qui poussent, des oiseaux qui chantent, du soleil qui réchauffe notre nez et nos doigts de pied , et ...de la beauté de la campagne verdoyante , et que la vie est belle - Enfin de tout ça quoi...

Et voilà que mon sourire se fige , que mes doigts de pied se recroqueville, que mon nez se rétrécit, et que le soleil se cache - presque . Vrai : il fait plus froid depuis 2 jours.

Et si le temps lui même - et la nature - et le soleil, ne nous disaient pas aussi, à leur façon, la tristesse de cette campagne - électorale - de ces affiches toutes plus laides les unes que les autres. Surtout quand elles sont mensongères, ou/et abimées par l'orgueil des hommes .

Alors, voilà : je garde le titre :"la campagne décolle enfin"et je rêve - un moment - que les hommes regardent Dame nature et s'en inspire , pour créer un monde plus

harmonieux - un monde où l'homme et la nature se retrouveraient - un monde où y aurait moins de machines, moins de biens - mais plus de liens

Chiche ! Si on essayait tout de suite ?