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Le rupellien

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1 juin 2015

Mi komencis lerni esperanton

esperanto

Mi komencis lerni esperanton. (la traduction est en dessous)

Ĝi estas facile lernebla lingvo. Gramatiko estas simpla kaj vortotrezoro ne estas eksterlanda por kiu iom praktikis kelkajn eŭropajn lingvojn, ankaŭ kiu lernis iom de latina kaj greka. Franck gvidas min kaj eniras mi la ludon.

Kial la esperanto ? Kaj kial nun ?

Ekde jaroj, parolis min Franck esperanton. Li volis konvinki min ke vera internacia lingvo estas necesa. Kial ne la angla ? Ĉar ĝi donas maljustan avantaĝon al tiuj kies gepatra lingvo ĝi estas. Mi restis skeptika.

Lasttage, mi devis uzi la anglan por komuniki kun miaj usonaj amikoj. Miaj amikoj estas kvakeroj. Ili kritikas ĉian dominon komencante kun tiu de sia lando. Parolante kun ili, mi ekkonsciis ke mi estis en malfacilaĵo : pli malrapida, malpli preciza, ne komprenanta ĉiun ĝuste, mankanta nuancojn ... Kiam ni samopinias, tio ne estas problemo. Sed kiam estas iu debato, estas io alia.

Franck min diris ke Micah Bales , la amiko kun kiu mi pridebatis senperforton, estas membro de la Facebook-grupo de la Usona Esperanto-Asocio. Mi komprenis ke la uzo de vere internacia lingvo estas necesa por egaleca kaj justa mondo.

Kaj mi komencis esperante skribi.

J'ai commencé à apprendre l'espéranto

C'est une langue facile à apprendre. Une grammaire simple et un vocabulaire qui n'est pas étranger à qui a un peu pratiqué quelques langues européennes et à aussi appris un peu de latin et de grec. Franck me guide et j'entre dans le jeu.

Pourquoi l'espéranto ? Et pourquoi maintenant ?

Depuis des années, Franck me parle de l'espéranto. Il voulait me convaincre qu'une véritable langue internationale était nécessaire. Pourquoi pas l'anglais ? Parce qu'elle donnerait un avantage injuste à ceux dont c'est la langue maternelle. Je restais sceptique.

Ces derniers jours, j'ai dû employer l'anglais pour communiquer avec mes amis états-uniens. Mais amis sont quakers. Ils critiquent toute domination à commencer par celle de leur propre pays. En parlant avec eux, j'ai pris conscience que j'étais en difficulté : plus lent, moins précis, ne comprenant pas tout correctement, manquant de nuances... Quand on n'est d'accord, ce n'est pas un problème. mais quand il y a débat, c'est une autre chose.

Franck me dit que Micah Bales, l'ami avec lequel je débattais au sujet de la non-violence, était membre du groupe Facebook de l'association états-unienne d'espéranto. je compris que l'emploi d'une vraie langue internationale était nécessaire pour un monde égalitaire et juste.

Et j'ai commencé à écrire en espéranto.

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2 avril 2015

Amen

Il y a dix jours nous avons accompagné "Tatie Hélène" vers sa dernière demeure. Elle rejoignait "Tonton Roger" qui l'avait quittée trois mois auparavant. Même église, même prêtre sympathique, même impression de n'avoir rien compris et rien retenu de son homélie.

La première fois, il y avait les anciens combattants, des drapeaux, des médailles sur un coussin, tout un décorum... J'avais pensé que ce jeune ecclésiastique s'était obligé à un exercice oratoire compliqué consistant à faire le lien entre les textes bibliques et la 2ème DB. Mais pour ma tante, il n'y avait qu'une famille réunie dans la simplicité, prête à écouter respectueusement le message évangélique.

En sortant je me suis dit, raisonnant subitement en ancien séminariste du diocèse, que c'était vraiment dommage qu'un prêtre dévoué et aimable passe et repasse ainsi à côté de son sujet lors d'un des rares contacts que l'Église peut avoir avec un public plus large que le petit troupeau vieillissant des catholiques pratiquants. Je me suis demandé s'il fallait lui dire et, bien sûr, je ne l'ai pas fait. Je me suis surtout demandé ce que j'aurais dit de simple et d'authentique en la circonstance.

A l'origine de la foi chrétienne, il y a l'affirmation que Jésus est ressuscité d'entre les morts. Les récits des Évangiles nous rapportent la découverte d'un tombeau vide, le message d'un ange et des apparitions de Jésus lui-même, mais tout cela nous semblerait bien douteux et anecdotique si nos cœurs n'étaient pas touchés.

Ce récit ne constitue pas une énième consolation religieuse ou philosophique devant notre condition mortelle. Il ne vient pas répondre à cette impossible question de savoir ce qui nous attend après la mort : néant, paradis, enfer, réincarnation, purgatoire... Le Christ ressuscité ne nous parle pas de tout cela. Il vient cheminer auprès de ses amis dans la peine, relit avec eux l'Écriture, se fait reconnaître en prononçant un prénom, en partageant du pain, en grillant des poissons... Il apparaît avec les marques de sa passion, fait toucher ses cicatrices, rien n'est effacé mais tout est paisible. Il ne vient pas entraîner ses amis au-delà de leur existence vers un monde supérieur, il les renvoie à la vie qu'ils ont partagée ensemble, il leur dit : "le royaume est parmi vous", il leur demande de ne pas rester plantés là "à regarder vers le Ciel", il leur donne son esprit pour les envoyer à l'aventure dans le vaste monde. Il ne leur dit pas "je vous attends" mais "je suis avec vous et je serais toujours avec vous."

Ça peut paraître curieux : la résurrection du Christ ne nous parle pas de la mort mais de la vie. Elle nous dit que notre vie peut se dérouler sans que pèse sur elle le poids de la mort : de notre mort et peut-être encore plus de la mort de ceux que nous aimons. Quand celle-ci viendra, à son heure, nous avons cette espérance, tellement plus forte et plus vivante que toutes les mortelles certitudes, que Dieu n'abandonne pas ses enfants, qu'il vient les chercher et qu'il les prend auprès de lui. "Le Seigneur est mon berger... Si je traverse le ravin de la mort, je ne crains aucun mal".

Au moment où nous quittent ceux que l'on aime, c'est leur vie que nous célébrons et leur vie nous renvoie à la relation unique que chacun d'entre nous avaient avec eux. Non seulement cette relation ne meurt jamais mais elle continue de fleurir en nous et de porter du fruit jusqu'à notre propre mort.

L'amour est plus fort que la mort, il a vaincu la mort. Amen.

19 mars 2015

Élection matinale

Ça nous avais déjà fait le coup il y a fort longtemps. J'étudiais encore la théologie et je travaillais à la poissonnerie pour payer mon loyer. C'était un jeudi, car c'est le jour du marché de Saint Louis et je me souviens que je m'y trouvais quand j'ai appris la nouvelle. J'avais veillé pour attendre le résultat des élections israéliennes, Shimon Peres l'avait emporté le soir mais le matin on nous annonçait la victoire de Netanyahou !

Ce doit être une spécialité locale, car avant de s'appeler "Israël", Jacob avait cru se coucher avec Rachel et en se réveillant il avait découvert Léa dans son lit. Léa devait donc être de droite. Ce qui est surprenant c'est qu'environ 2% des Israéliens ont confessé au sortir de l'isoloir qu'ils avaient voté pour la gauche alors qu'ils avait glissé un bulletin "Bibi" dans l'urne. Pourquoi n'ont-ils pas avoué un vote de centre-gauche ou même de centre-droit très honorable ? A mon avis, parce qu'ils craignaient qu'on entende leur réponse et que leur entourage ne pouvait pas envisager un vote plus à droite que le vote travailliste, bref, parce qu'ils étaient arabes.

Quand Netanyahou avait été élu pour la première fois, j'avais discuté avec un ami israélien, Juif d'origine irakienne, votant d'habitude à gauche, et il m'avait expliqué pourquoi il avait soutenu le Likoud. Rabbin venait d'être assassiné par un Séfarade, Peres représentait l'establishment ashkénaze, et mon ami s'était senti montré du doigt en temps que Juif d'origine arabe. Un autre ami israélien, arabe musulman, m'expliquait de son côté qu'il soutenait la droite, seule capable de tenir tête à ce "dictateur d'Arafat", mais évidemment sans le dire à ses voisins.

J'imagine que sur place, on a disséqué les résultats par quartiers et par municipalités. De quoi confirmer ou infirmer mon hypothèse. Mais, de toute façon, il faut bien dire que ce vote ne va pas dans le sens du Sionisme qui suppose l'existence d'un État palestinien pour permettre celle d'un État juif. Or c'est une perspective que Netanyahou vient de repousser et qu'il risque de rentre impossible en poursuivant la colonisation. De quoi réjouir les extrémistes des deux peuples.

Les Palestiniens modérés veulent un État dans les limites, grosso modo des Territoires Occupés. Ils n'accepteront pas de se laisser enfermer durablement dans des enclaves ce qui reviendrait à un véritable Apartheid. J'emploie ce mot avec prudence, car il est utilisé à tord et à travers par les anti-israéliens. Mais il est clair que si la perspective de la création de l'État palestinien disparaissait, il ne resterait plus qu'a constater une ségrégation que personne n'acceptera. La seule solution sera alors l'annexion de la Cisjordanie qui supposerait de conférer à ses habitants arabes la nationalité israélienne et de modifier l'équilibre démographique d'Israël ce qui créerait, in fine, un État binational.

On se serait endormi avec le "grand Israël" et réveillé avec la "grande Palestine".

7 mars 2015

A la recherche des ânesses

Ce matin au "Café Bible" : intronisation de Saül ; premier livre de Samuel, les chapitres 9 à 12. Ces textes mêlent des traditions anciennes sur l'origine de la première dynastie israélite et une relecture post-exilique peu amène envers la royauté. Samuel reproche aux Israélites de vouloir un roi "comme les autres peuples" alors que la singularité d'Israël est d'avoir Dieu pour roi. Finalement, c'est Dieu lui-même qui désigne Saül mais le peuple est averti : si vous suivez la Torah, tout se passera bien, mais si vous vous en éloignez vous regretterez votre choix. Très moderne !

J'interprète :

Pourquoi vouloir un roi quand on peut se gouverner soi-même ? Mais, si vous insistez, vous aurez les rois que vous mériterez. Les scribes du VIème ou du Vème siècle font une description apocalyptique des rois qui se sont succédé sur le trône de David et de Salomon, tous déviants à l'exception de Josaphat et surtout d'Ézéchias et de Josias. Ces deux derniers étaient à l'origine des réformes religieuses qui allaient mener au monothéisme. Il savaient donc de quoi ils parlaient ! Pourrait-on aller jusqu'à en déduire qu'on a toujours des gouvernants qui sont à l'image de nos propres vertus et le plus de souvent de nos propres vices ? Toute ressemblance, ex cetera, ex cetera...

Mais c'est un autre passage, très savoureux, qui m'a arrêté :

Samuel a été averti qu'un homme allait se présenter devant lui à la porte de sa ville et que c'était celui-ci qu'il devrait sacrer roi. Pendant ce temps, Saül, un beau grand jeune homme, parcourait la campagne avec ses compagnons à la recherche des ânesses de son père qui avaient déguerpi. Ils arrivent finalement dans la patrie du prophète qu'ils désirent consulter pour savoir... où sont passées les ânesses ! Une jeune fille sortie pour puiser de l'eau leur indique le chemin et Saül tombe sans le reconnaître sur Samuel qui sortait de la ville pour offrir un sacrifice. Samuel lui dit de laisser tomber les ânesses car d'autres les ont retrouvées, il l'invite au sacrifice puis ils passent la nuit à discuter sur un toit en terrasse. Au petit matin, Samuel raccompagne Saül et lui déclare : "je vais te dire ce que Dieu veux pour toi". Il sort une fiole d'huile et l'oint roi... sans témoin !

Il est probable que tout ceci soit symbolique. Je propose de voir dans les ânesses une forme d'intelligence vagabonde dont la recherche est le préalable à un autre type de rencontre. L'âne dans la Bible est considéré comme un animal intelligent, ce qui n'est pas bête quand on y pense. Que ce soit une puiseuse d'eau qui y conduise me semble assez fort. La nuit passée à parler sur le toit serait une forme d'initiation que l'onction secrète sur le chemin vient achever. On est en présence d'une belle légende issue de la petite tribu de Benjamin, la tribu de Saül. Les relectures de l'histoire à l'époque du triomphe de la monarchie davidique montreront Saül comme un homme dérangé, fou de jalousie envers David. Plus tard encore, l'ensemble sera enchâssé dans des textes anti-monarchiques. Mais cette tradition n'a pas été effacée.

Intentionnellement ? Je le pense car c'est dans le mille feuilles des lectures et des relectures qui constituent la Bible que cette littérature tire toute sa force interprétative. La Bible parle tout le temps d'esclavage et de libération, mais cette libération ce joue avant tout dans la possibilité qu'elle offre à ses lecteurs de broder sur sa trame leur propre histoire.

Mais, au fait, où sont passées les ânesses de mon père ?

6 mars 2015

Quand le "reste" vote

Les cantonales en ville c'est un peu compliqué. Il faut d'abord savoir à quel canton on appartient. A la campagne, il y a des chefs lieux de cantons, marqués "CT" sur les cartes IGN. Une fierté locale qui a dû en prendre un coup quand on a regroupé par deux ou même par trois les anciens cantons pour introduire la parité. En ville, on peut changer de canton en traversant la rue. Pour compliquer le tout dans mon quartier on pouvait changer trois fois de municipalités tout en restant dans le même canton. Les choses se sont un peut simplifiées. Maintenant on a "La Rochelle 1", "La Rochelle 2", "La Rochelle 3". Mais, jusqu'à ce matin, j'ignorais mon numéro.

Il faut dire que la frontière avec "La Rochelle 2 ouest" se trouve à 200 mètres vers l'ouest et que "La Rochelle 1 centre" commence à 500 mètres vers le sud. Le décret que j'ai téléchargé décrit avec précision les limites des deux premiers cantons et ajoute que le troisième est constitué de "ce qui reste de La Rochelle". J'habite donc finalement le canton 3 dit "Est", peut-être parce que dans "reste" il y a "est".

On a bien entendu attribué le n°1 à la partie qui comprend la mairie et qui concentre richesse et prestige. Vont s'y affronter la bourgeoisie de gauche et la bourgeoisie de droite. Le n°2 est celui du port, de l'industrie, des grands ensembles de logements populaires. Le n°3 comprend de part et d'autre d'un ensemble social des années 70, Villeneuve les Salines, des quartiers de pavillons modestes plus ou moins dotés d'extensions, percés ça et là de petits HLM et d'immeubles promoteurs habités par des représentants de la classe moyenne. Le "reste" quoi.

Les quatre duos d'impétrants principaux qui se disputent le canton représentent le FN, l'UMP, la majorité municipale de centre gauche et le PS. Le mode de scrutin ne permettra vraisemblablement qu'à deux d'entre eux de s'affronter au second tour mais lesquels ?

La sociologie du canton le destine naturellement à la gauche mais trois questions se posent :

- Le PS va-t-il parvenir à convaincre son électorat de ne pas aller protester plus à gauche où au contraire va-t-il se diviser au profit des "dissidents" de la majorité municipale ?

- Ceux-ci bénéficieront-ils encore des voix de droite et du centre qui s'étaient portées sur eux pour faire battre les candidates socialistes aux législatives et aux municipales ? (Ségolène s'en souvient) On peut en douter, mais peut-être qu'un vote légitimiste peut prendre le relais d'un vote "calcul".

- La droite qui normalement n'a aucune chance va-t-elle bénéficier du rejet de la politique du gouvernement où pâtir d'une poussée du FN qui réalise ses meilleurs scores sur ce canton ?

Finalement, le canton numéro 3 est un petit laboratoire politique qui mêle les enjeux locaux et nationaux.

J'essaye toujours, pour ma part, de voter sincèrement et sans calcul, pour les candidats que je crois les plus aptes et les plus proches de mes idées. Mon vote ira donc, sauf coup de théâtre, à la majorité municipale. Peut-être un indice du vote centriste, mais il faut savoir que j'ai un don pour voter du premier coup pour les perdants, seule exception, les dernières municipales...

la-rochelleLe canton "La Rochelle 3 'Est' " est le bleu.

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5 mars 2015

Toute la vie

C'est le buzz du moment : la chanson des Restos du Coeur serait anti-jeunes. Le clip surtout qui montre des jeunes d'un côté face à une rangé d'artistes de l'autre se livrer à une joute, on dit une "batteule" (battle). Les premiers se plaignent de leur sort reprochant à la génération précédente d'avoir tout eu, laquelle répond qu'eux ont "toute la vie", c'est le titre de la chanson, pour faire leurs preuves. C'est gentiment moralisant mais pour la bonne cause et ça n'avait pas suscité d'émoi jusqu'à ce qu'un tourbillon médiatique s'en empare.

Au delà de la chanson, ce sont les réactions déchaînées qu'elle a suscité qu'il conviendrait d'analyser. Mais c'est un peu triste. Et Jamel Debbouzze l'a bien dit "qu'est-ce qu'on vient faire ch... les restos du coeurs !". Autant dire que plus personne ne moufte. Encore plus dissuasif : le sourire carnassier de Marine Le Pen se félicitant de voir les "bobos" s'entre déchirer. De quoi siffler la fin de la récréation. Il y aurait peut-être quelque chose à redire que je n'ai lu nulle part.

La réponse au ressentiment qu'exprime les jeunes est qu'ils ont "toute la vie" devant eux. Ce n'est donc pas une chanson anti-jeune mais subtilement anti-vieux. A bientôt 48 ans, elle m'a foutu les jetons. Quelque chose me dit d'ailleurs que les plus indignés ne sont pas forcément les plus jeunes. En fait je ne me reconnais ni dans la complainte attribuée aux jeunes qui semblent aspirer à hériter, ni dans la réponse qui leur dit de mériter. La logique des uns et des autres est la même, c'est celle de l'être, on pourrait aussi bien dire de l'avoir : "Je suis ce que je suis et tu as le temps de le devenir toi aussi". La réponse devrait être celle du "néant" : nous ne sommes jamais qui nous sommes, nous devenons toujours, à nouveau, sans cesse... Logique de la relation et non de la possession, à commencer par la possession de soi.

Autrement dit : qu'on ait une journée à vivre ou statistiquement soixante-ans, on a toujours "toute la vie" devant soi car "toute la vie" se trouve dans le regard de l'autre.

4 mars 2015

Plus belle la vie

En ce moment nous regardons "looking" une petite série américaine très formatée : épisodes d'une demi-heure, les aventures sentimentales de trois homos à San Francisco, une scène torride par séance, parfois deux, les acteurs ont été sélectionnés en conséquence. Aucune prétention artistique ou philosophique, mais ça nous fait un bien fou !

En tout cas, rien à voir avec la série précédente, "the knick" : histoire des débuts de la chirurgie dans un hôpital pour pauvres de New York. Personnages complexes filmés génialement par Soderberg en clair obscur - on appuyait sur "pause" pour contempler les tableaux - critique sociale implacable qui nous ramène subtilement à notre époque : toxicomanie, avortement, racisme, éthique médicale, financement du système de santé... Bref, "interdit aux moins de 16 ans" pas seulement à cause des opérations filmées en gros plan.

Looking se contente d'un "moins de douze ans", ce qui veut dire qu'à l'age où j'ignorais l'existence même de l'homosexualité, on considère, aujourd'hui, qu'on peut tout savoir sur sa pratique. Quand Pink-Tv était une vraie chaîne de télévision, elle passait ce genre de "bluette" le dimanche soir à 20h30 et ça nous permettait d'aborder la semaine sans angoisses. On regardait des gens qui nous ressemblent, dont les petits soucis servaient juste à corser un peu des histoires d'amour qui finissaient toujours bien.

L'étudiant libéré arrachait le jeune mormon complexé à l'enfer homophobe de sa secte et un avenir radieux s'ouvrait devant eux. Autant dire que le lundi soir, on était mieux disposé quand deux blondinets en chemise blanche voulaient nous parler de notre salut au sortir de la gare des Chantiers.

Hier, Kévin attendait Patrick devant sa maison pour lui dire qu'il avait finalement rompu avec Jon car il l'aimait comme un fou. De son regard brulant il l'implorait : "veux-tu bien de moi ?". Les lèvres de son compagnon vinrent cueillir ces mots sur les siennes en guise de réponse. Je ne sais pas si cela à un rapport mais mon taux de glycémie s'était nettement amélioré ce matin.

Je me demandais en allant au travail si 99% des séries "normales" où il n'est question que d'amour hétérosexuel faisaient le même effet aux hétéros ? C'est décidé, si je gagne à l'Euromillion vendredi, je recrée Pink-Tv.

3 mars 2015

Retour clandestin

Le blog que j'ai interrompu en septembre à cause de l'intrusion des Dieudono-fachistes de La Rochelle reprend mais uniquement ouvert aux "invités", dont vous êtes si vous pouvez lire ces lignes. Normalement ...

Pour la petite histoire, le groupe qui avait menacé la librairie, à mots couverts évidemment ( le "dieudonisme" est aussi un art du sous-entendu légal), a tenté d'exploiter le soutien qu'il avait apporté au maire durant la campagne pour obtenir une subvention annuelle de 450 000 euros. 8 emplois bien payés, les leurs, pour apporter la paix sociale dans les quartiers. Non seulement, le maire a refusé, mais il a démis, fait assez rare, l'adjoint qui était le chef de la bande. S'en est suivi une campagne menaçante contre la municipalité, toujours à mots couverts, évidemment.

L'autre raison pour laquelle je rends mon blog confidentiel est bien plus réjouissante : à partir de septembre, je serai à nouveau professeur de culture biblique à Notre-Dame de Sion ! Je préfère donc éviter que mes élèves puissent faire un tour sur mon journal. Ce "retour à Sion" sera l'objet de mon premier blog. Le temps d'envoyer les invitations.

A suivre...

10 janvier 2015

Jésus est Charlie

Jésus qui fut accusé d'être un blasphémateur et qui en est mort, eut cette parole :

"En vérité, je vous déclare que tout sera pardonné aux fils des hommes, les péchés et les blasphèmes aussi nombreux qu'ils en auront proféré. Mais si quelqu'un blasphème contre l'Esprit Saint, il reste sans pardon à Jamais." Mc 3,28-29

Mt 12,32 ajoute "Si quelqu'un dit une parole contre le Fils de l'Homme, cela lui sera pardonné."

Les évangélistes furent embarrassés par cette citation, peut-être comme bien des chrétiens semblent gênés à l'idée de dire "je suis Charlie" alors qu'ils rêvaient de faire interdire ce journal et de rétablir des lois "anti-blasphème". Cette citation fut insérée dans le contexte où Jésus est traité de "possédé" par les uns et considéré comme "fou" par sa parenté. Le raccord était si peu évident qu'une main a ajouté : "C'est parce qu'ils disaient : 'il a un esprit impur'." Mc 3,30 Ce qui ne semble pas beaucoup plus clair.

Je pense que le vrai contexte de cette phrase choc de Jésus, phrase qu'il a dû employer souvent et qui faisait partie des maximes du "maître de Nazareth" était un commentaire de la Torah, plus précisément de la troisième "parole" du Décalogue :

"Tu n'élèveras pas le nom d'YHWH ton Dieu en vue d'une fausseté car YHWH n'innocente pas celui qui élève son nom en vue d'une fausseté" Ex 20,7

"Tu n'élèveras pas", on pourrait dire "tu ne brandiras pas", évoque un mouvement vers le ciel. Cela semble plus être lié à un geste qui prend à témoin le ciel qu'au simple fait d'élever la voix (traduction toujours possible). "En vue d'une fausseté" , Un des meilleurs dictionnaires traduit : "to no good purpose" en vue d'un mauvais dessein.

On est loin du "tu ne prononceras pas en vain, où à tord" qui ramena cette parole devenue "commandement" à l'interdit religieux du blasphème qu'on trouve dans les catéchismes. Cette interprétation avait déjà court parmi les contemporains de Jésus, d'où sa précision : le péché qui prive de tout pardon, ce n'est pas le blasphème, mais le péché contre l'Esprit.

Utiliser le nom de Dieu pour un mauvais dessein, pour tromper autrui. Le contraire de la "sanctification du Nom", du véritable "témoignage", en grec "martyre", qu'on retrouve dans la prière juive "lehitqaddesh shemkha" : "que ton Nom soit sanctifié". Utiliser le Nom de Dieu en vue de tromper : péché qui atteint dans un même mouvement Dieu et le prochain. Se servir de l'idée qu'on se fait de Dieu pour nuire. Et pas de n'importe quel "Dieu", de celui qui se déclare dans la libération des captifs et la destructions des idoles. De celui qui est "Esprit".

Les blasphèmes et les caricatures provocatrices, ne peuvent, par définition ne s'attaquer qu'aux idoles, qu'aux images qu'on se fait de "Dieu". A la limite, et peut-être pas qu'à la limite, elles procèdent du mouvement de déconstruction de toute image de "Dieu" qui est à la base même de la vraie foi monothéiste. Merci Charlie de dégommer nos caricatures religieuses par tes caricatures irréligieuses. Merci de désacraliser ce qui n'a pas à être sacré : le pouvoir, l'argent et tous les "phallus".

Dans le slogan "je suis Charlie", je dois dire que ce qui m'a effrayé au départ c'est "Je suis". Ne transformons pas notre émotion en mouvement identitaire. Ne devenons pas des "je suis" contre des "eux, ils ne sont pas". Mais en ajoutant "Charlie" à "je suis", on renverse ironiquement cette logique, du moins je l'espère. Car il n'est rien de plus opposé à l'identitaire que l'anarchiste.

La lettre tue, l'Esprit vivifie. Il n'est de péché irrémédiable que contre l'Esprit. Il n'est de blasphème que de tuer au nom de Dieu. Ne craignons pas ceux qui peuvent tuer le corps.

Charlie est ressuscité !

 

30 décembre 2014

Histoires d'amour

Cet après-midi, coup de téléphone à la librairie, une voix d'homme un peu stressée :

- Vendez-vous des ouvrages sur le divorce ?

En fait, j'en ai plein qui traitent du divorce du point de vue catholique où la question des divorcées remariés fait couler beaucoup d'encre et vendre très peu de papier. Peut-être que l'angoisse que je sens dans la voix de mon interlocuteur trahit-elle un tourment religieux. Je pose prudemment la question :

- Vous voulez un ouvrage qui aborde le divorce sous quel angle ?

- Vous comprenez, je voudrais divorcer.

- Alors il vous faudrait un ouvrage plutôt juridique, personnellement je ne vends que des livres spirituels sur la question.

- Juridique ? Je ne sais pas. Il faut que je divorce mais je ne sais pas comment m'y prendre.

La voix s'était accélérée traduisant l'urgence de la situation.

Je lui ai conseillé "le divorce pour les nuls" et je l'ai orienté vers la librairie généraliste de La Rochelle.

En raccrochant, je repensais à une scène étrange dont nous venions d'être les témoins lors de notre promenade post-prandiale.

Au pied, d'une des tours du port, un homme mis soudain un genou à terre comme un chevalier devant une femme et, tendant cérémonieusement une bague brillante posée comme une fleur sur son poing, il lui déclara : "veux-tu m'épouser" ? Nous étions juste à leur hauteur, si bien que nous entendîmes très distinctement la demande.

Après avoir fait quelques pas, et à la faveur d'un petit changement de direction, nous jetâmes un regard en arrière : visiblement, c'était "oui".

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