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Le rupellien
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24 décembre 2013

Homélie de Noël

En guise de message de Noël, je reproduis ici un courriel que j'ai envoyé à un ami prêtre à propos d'une très belle homélie qu'il a prononcé sur l'Évangile de Matthieu (1,18-25). Je ne cite pas mon ami qui est un excellent bibliste et un talentueux prédicateur, car je ne juge pas vraiment son homélie, je prononce plutôt la mienne !

" Je viens d'écouter ton homélie sur Joseph. Tu y dis des choses très intéressantes et profondes mais quelque chose me gêne et a sûrement gêné certains de tes auditeurs : tout ton développement s'appuie, comme le fait Saint Bernard sur l'idée que Joseph aurait voulu s'éloigner de Marie parce qu'il aurait été conscient du mystère de l'Incarnation. Peut-on construire un sens approfondi si spirituel soit-il contre le sens littéral ?

J'imagine le paroissien qui t'écoute, comme moi, et se dit, comme moi, c'est beau mais ce n'est pas ce qui est écrit. Joseph ne veut pas répudier Marie publiquement parce qu'il ne veut pas l'exposer à opprobre et l'ange le rassure en lui disant que l'enfant vient justement de l'Esprit Saint. Bernard tord le texte pour des raisons qu'il faudrait peut-être interroger.

Pourquoi ne pas faire confiance à Matthieu ? Joseph savait que l'enfant n'était pas de lui mais il savait aussi que Marie ne méritait pas l'opprobre. Curieusement Joseph se tait et Marie se tait. Nulle forme d'explication entre eux. Finalement s'est un songe qui lui révèle l'origine spirituelle de cette grossesse. L'histoire est profondément intrigante. Bernard a peut-être pensé que l'étrangeté de la situation appelait une explication rationnelle théologiquement et spirituellement. Mais du coup n'a-t-il pas tout aplati ?

Je le crois. La force de ce passage m'a été révélé, non pas par une musulmane*, altérité "facile", mais par un homosexuel communiste athée, altérité "difficile" : Pier Paolo Pasolini. Dans "l'Evangile Selon Saint Matthieu", il a fait le choix de coller à la littéralité, choix cohérent avec son matérialisme, mais du coup, il fait éclater la puissance du mystère de l'Incarnation. Ce qu'ont très bien compris ses amis communistes qui n'ont pas aimé le film et les catholiques qui eux l'ont primé. Dans la scène en question Joseph se rend chez Marie et elle lui découvre sans un mot la forme arrondie de son ventre, un échange de regards montre celui de Joseph qui est bouleversé et celui de Marie qui demeure humble et confiant. Joseph s'enfuit à travers champs. On le voit agité dans son sommeil et le lendemain, courant par le même chemin, il regagne la maison Marie où, toujours sans un mot, leurs deux regards fusionnent dans la joie.

Effectivement, Joseph est bien le père de l'enfant. Il le devient dans le regard de sa femme avant même que son psychisme ne lui révèle. C'est une histoire incroyablement humaine mais tellement divine qu'à ce moment-là, on commence à croire au mystère. Incanatus est.

*Référence à l'homélie où mon ami parlait d'une musulmane rencontrée qui lui avait fait des objections à l'idée d'incarnation.

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